Mardi le 15 février 2005
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2:57:06 PM
Débat sur le mariage : lettre de la Conférence des évêques au Premier ministre

Liberté de religion et de conscience : de réels dangers existent

(CECC - Ottawa)... Selon les évêques catholiques du Canada, des failles importantes dans le projet de loi C-38 portant sur la redéfinition du mariage pourraient mettre en péril la protection de la liberté de religion et de conscience pourtant promise par le gouvernement fédéral.

Mgr Brendan M. O'Brien, archevêque de St-Jean, Terre-Neuve, et président de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC), exprime ainsi ses inquiétudes à l'égard de ce projet de loi, dans une lettre adressée au Premier ministre du Canada, Paul Martin.

Si le texte rappelle l'opposition des évêques et réitère les arguments fondamentaux pour le maintien du mariage - une alliance d'amour pour la vie entière entre un homme et une femme - il soulève aussi, cette fois, des ambiguïtés du projet de loi qui pourraient poser un danger pour les groupes religieux.

L'épiscopat canadien craint que, dans le Projet de loi C-38, le gouvernement du Canada omette d'affirmer son intention de coopérer avec ses homologues provinciaux et territoriaux sur divers aspects du mariage qui relève de leur juridiction. Peut-on, entre autres, garantir que les membres de groupes confessionnels puissent en toute liberté, partout au Canada, enseigner et prêcher sur le mariage, de même que sur l'homosexualité, conformément à leur conscience et leurs croyances religieuses? Et les lieux sacrés ou installations appartenant ou étant louées par un organisme rattaché à un groupe confessionnel, seront-ils protégés contre toute utilisation obligatoire pour des cérémonies du mariage incompatibles avec leurs convictions religieuses? Pourrait-on aussi obliger les officiers, tant civils que religieux, à présider des mariages dont les conditions sont inconciliables avec leur conscience et leurs convictions religieuses?

De plus, Mgr O'Brien redoute que le statut d'organisme de bienfaisance de plusieurs groupes confessionnels soit menacé si ceux-ci n'acceptent pas la redéfinition proposée du mariage.

Enfin, le président de la CECC invite de nouveau le Premier ministre à faire en sorte que tous les députés de la Chambre des communes, y compris les membres de son Cabinet, puissent voter librement sur cette importante question.


Monsieur Paul Martin
Premier ministre du Canada
80, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A2

Monsieur le Premier Ministre,

Les évêques catholiques du Canada s'opposent au Projet de loi C-38, Loi concernant certaines conditions de fond du mariage civil. Notre opposition se fonde sur la conviction que la redéfinition proposée du mariage ne sert pas le bien commun de la société et ne règle pas les ambiguïtés relatives à la protection de la liberté de conscience et de religion. Nous continuerons d'encourager les 13 millions de catholiques du Canada, en lien avec les millions d'autres Canadiens et Canadiennes de toutes confessions religieuses ou sans allégeance particulière, à exprimer leurs préoccupations à l'égard de ce projet de loi.

Nonobstant la décision de la Cour suprême du Canada au sujet du renvoi sur le mariage et de l'inclusion de la conscience et de la religion comme libertés fondamentales dans la Charte canadienne des droits et libertés, dans le Projet de loi C-38, le gouvernement du Canada omet :

1- de reconnaître, protéger et réaffirmer la définition du mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme, définition que la Cour suprême n'a pas jugée contraire à la Charte des droits et libertés, ni mentionné qu'elle devrait être reformulée afin de se conformer à la Charte;

2- d'affirmer son intention de coopérer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux dans la mise en oeuvre de lois et règlements qui assurent une pleine protection de la liberté de conscience et de religion, de sorte que les Canadiens et Canadiennes ne soient pas contraints d'agir contrairement à leur conscience et à leurs croyances religieuses;

3- d'affirmer son intention de coopérer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin de garantir que les leaders et les membres de groupes confessionnels puissent en toute liberté, partout au Canada, enseigner et prêcher sur le mariage, de même que sur l'homosexualité, conformément à leur conscience et leurs croyances religieuses;

4- d'affirmer son intention de coopérer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin de garantir qu'en plus des lieux sacrés, toutes les installations appartenant ou étant louées par un organisme rattaché à un groupe confessionnel soient protégées contre toute utilisation obligatoire pour des cérémonies du mariage qui sont incompatibles avec les convictions religieuses de ce groupe confessionnel;

5- d'affirmer son intention de coopérer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin de garantir que tous les officiers, tant civils que religieux, qui président des mariages dans chaque province ou territoire du Canada soient protégés contre l'obligation d'officier lorsqu'il s'agit de conditions inconciliables avec leur conscience et de leurs convictions religieuses;

6- de protéger les groupes confessionnels qui n'acceptent pas la redéfinition proposée du mariage contre toute forme de pénalité par rapport à leur statut d'organisme de bienfaisance.

Le mariage constitue une alliance d'amour pour la vie entière entre un homme et une femme -- une relation essentielle à la survie de la société. Ses buts fondamentaux sont le bien du couple, la procréation et l'éducation d'enfants. Le mariage, en tant que l'union d'un homme et d'une femme, constitue une institution unique et irremplaçable qui, en conséquence, mérite d'être protégée par le gouvernement et reconnue socialement.

L'intérêt que porte l'État envers l'institution du mariage a toujours été fondé - et il devrait continuer d'en être ainsi - sur l'intégration des sexes dans une cellule sociale idéale dans laquelle naissent et sont élevés des enfants, non seulement pour le bénéfice des enfants, mais pour celui de la société dans son ensemble. Le projet fait fi de cet intérêt ancestral et le remplace par un intérêt qui se fonde sur un engagement entre personnes. Une fois ce type d'intérêt reconnu par l'État, il est clair que le mariage en tant qu'institution sociale devient vide de sens, puisque toutes les formes d'alliance entre adultes consentants pourront dorénavant être traitées sur un pied d'égalité.

Pourquoi se précipite-t-on dans une législation radicalement différente qui pourrait avoir d'importantes conséquences à long terme pour toute la société et qui risque de diviser notre pays sur la question de liberté de conscience et de religion?

Finalement, conformément à la décision de la Cour suprême du Canada dans le renvoi relatif au mariage et en toute fidélité à la liberté de conscience et de religion contenue dans la Charte canadienne des droits et libertés, en tant que leaders pastoraux de la communauté catholique du Canada, nous en appelons à nouveau à vous et aux autres chefs des partis politiques fédéraux afin de voir à ce que tous les membres de la Chambre des Communes, y compris les membres du Cabinet, puissent voter librement, selon leur conscience.

Sincèrement,


Mgr Brendan M. O'Brien
Archevêque de St. John's
Président de la Conférence des évêques catholiques du Canada

Cc. : M. Stephen Harper, chef de l'Opposition officielle et chef du Parti conservateur du Canada
M. Gilles Duceppe, chef du Bloc Québécois
M. Jack Layton, chef du Nouveau parti démocratique du Canada


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