Jeudi le 26 janvier 2006
...l’engagement pour la justice, travaillant à l’ouverture de l’intelligence et de la volonté aux exigences du bien, intéresse profondément l’Église.

...la tâche de l’Église est médiate, en tant qu’il lui revient de contribuer à la purification de la raison et au réveil des forces morales, sans lesquelles des structures justes ne peuvent ni être construites, ni être opérationnelles à long terme.

...L’Église ne peut jamais se dispenser de l’exercice de la charité en tant qu’activité organisée des croyants et, d’autre part, il n’y aura jamais une situation dans laquelle on n’aura pas besoin de la charité de chaque chrétien, car l’homme, au-delà de la justice, a et aura toujours besoin de l’amour.

...«De nos jours, [...] à cause des facilités plus grandes offertes par les moyens de communication, la distance entre les hommes est en quelque sorte vaincue [...], l’action caritative peut et doit aujourd’hui avoir en vue absolument tous les hommes et tous les besoins» Décret sur l’apostolat des laïcs Apostolicam actuositatem, n. 8.

...nous sommes tous animés de la même motivation fondamentale et que nous avons devant les yeux le même but : un véritable humanisme, qui reconnaît dans l’homme l’image de Dieu et qui veut l’aider à mener une vie conforme à cette dignité.

...l’humanisation du monde ne peut être promue en renonçant, pour le moment, à se comporter de manière humaine.

...la charité ne doit pas être un moyen au service de ce qu’on appelle aujourd’hui le prosélytisme. L’amour est gratuit. Il n’est pas utilisé pour parvenir à d’autres fins. Cela ne signifie pas toutefois que l’action caritative doive laisser de côté, pour ainsi dire, Dieu et le Christ. C’est toujours l’homme tout entier qui est en jeu. Souvent, c’est précisément l’absence de Dieu qui est la racine la plus profonde de la souffrance. Celui qui pratique la charité au nom de l’Église ne cherchera jamais à imposer aux autres la foi de l’Église. Il sait que l’amour, dans sa pureté et dans sa gratuité, est le meilleur témoignage du Dieu auquel nous croyons et qui nous pousse à aimer. Le chrétien sait quand le temps est venu de parler de Dieu et quand il est juste de Le taire et de ne laisser parler que l’amour. Il sait que Dieu est amour (cf. 1 Jn 4,8) et qu’il se rend présent précisément dans les moments où rien d’autre n’est fait sinon qu’aimer. Il sait - pour en revenir à la question précédente - que le mépris de l’amour est mépris de Dieu et de l’homme, et qu’il est la tentative de se passer de Dieu. Par conséquent, la meilleure défense de Dieu et de l’homme consiste justement dans l’amour. La tâche des Organisations caritatives de l’Église est de renforcer une telle conscience chez leurs membres, de sorte que, par leurs actions - comme par leurs paroles, leurs silences, leurs exemples -, ils deviennent des témoins crédibles du Christ.

...Dans son hymne à la charité (cf. 1 Co 13), saint Paul nous enseigne que la charité est toujours plus qu’une simple activité : «J’aurai beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurai beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne sert à rien» (v. 3). Cette hymne doit être la Magna Charta de l’ensemble du service ecclésial. En elle sont résumées toutes les réflexions qu’au long de cette Encyclique j’ai développées sur l’amour. L’action concrète demeure insuffisante si, en elle, l’amour pour l’homme n’est pas perceptible, un amour qui se nourrit de la rencontre avec le Christ. La participation profonde et personnelle aux besoins et aux souffrances d’autrui devient ainsi une façon de m’associer à lui : pour que le don n’humilie pas l’autre, je dois lui donner non seulement quelque chose de moi, mais moi-même, je dois être présent dans le don en tant que personne.

...Plus une personne oeuvre pour les autres, plus elle comprendra et fera sienne la Parole du Christ : «Nous sommes des serviteurs quelconques» (Lc 17, 10). En effet, elle reconnaît qu’elle agit non pas en fonction d’une supériorité ou d’une plus grande efficacité personnelle, mais parce que le Seigneur lui en fait don. Parfois, le surcroît des besoins et les limites de sa propre action pourront l’exposer à la tentation du découragement. Mais c’est alors justement que l’aidera le fait de savoir qu’elle n’est, en définitive, qu’un instrument entre les mains du Seigneur ; elle se libérera ainsi de la prétention de devoir réaliser, personnellement et seule, l’amélioration nécessaire du monde. Humblement, elle fera ce qu’il lui est possible de faire et, humblement, elle confiera le reste au Seigneur. C’est Dieu qui gouverne le monde et non pas nous. Nous, nous lui offrons uniquement nos services, pour autant que nous le pouvons, et tant qu’il nous en donne la force. Faire cependant ce qui nous est possible, avec la force dont nous disposons, telle est la tâche qui maintient le bon serviteur de Jésus-Christ toujours en mouvement: «L’amour du Christ nous pousse» (2 Co 5,14).

...
L’expérience de l’immensité des besoins peut, d’un côté, nous pousser vers l’idéologie qui prétend faire maintenant ce que Dieu, en gouvernant le monde, n’obtient pas, à ce qu’il semble: la solution universelle de tous les problèmes. D’un autre côté, elle peut devenir une tentation de rester dans l’inertie, s’appuyant sur l’impression que, quoi qu’il en soit, rien ne peut être fait. Dans cette situation, le contact vivant avec le Christ est le soutien déterminant pour rester sur la voie droite : ni tomber dans un orgueil qui méprise l’homme, qui en réalité n’est pas constructif mais plutôt détruit, ni s’abandonner à la résignation, qui empêcherait de se laisser guider par l’amour et, ainsi, de servir l’homme. La prière comme moyen pour puiser toujours à nouveau la force du Christ devient ici une urgence tout à fait concrète. Celui qui prie ne perd pas son temps, même si la situation apparaît réellement urgente et semble pousser uniquement à l’action. La piété n’affaiblit pas la lutte contre la pauvreté ou même contre la misère du prochain. La bienheureuse Teresa de Calcutta est un exemple particulièrement manifeste que le temps consacré à Dieu dans la prière non seulement ne nuit pas à l’efficacité ni à l’activité de l’amour envers le prochain, mais en est en réalité la source inépuisable. Dans sa lettre pour le Carême 1996, la bienheureuse écrivait à ses collaborateurs laïcs: «Nous avons besoin de ce lien intime avec Dieu dans notre vie quotidienne. Et comment pouvons-nous l’obtenir ? À travers la prière».

...Le moment est venu de réaffirmer l’importance de la prière face à l’activisme et au sécularisme dominant de nombreux chrétiens engagés dans le travail caritatif. Bien sûr, le chrétien qui prie ne prétend pas changer les plans de Dieu ni corriger ce que Dieu a prévu. Il cherche plutôt à rencontrer le Père de Jésus Christ, lui demandant d’être présent en lui et dans son action par le secours de son Esprit. La familiarité avec le Dieu personnel et l’abandon à sa volonté empêchent la dégradation de l’homme, l’empêchent d’être prisonnier de doctrines fanatiques et terroristes.

...Souvent, il ne nous est pas donné de connaître la raison pour laquelle Dieu retient son bras au lieu d’intervenir.

...«Si comprehendis, non est Deus - Si tu le comprends, alors il n’est pas Dieu» Saint Augustin Sermon 52, 16: PL 38, 360

...les chrétiens continuent de croire, malgré toutes les incompréhensions et toutes les confusions du monde qui les entoure, en la «bonté de Dieu et en sa tendresse pour les hommes» (Tt 3,4). Bien que plongés comme tous les autres hommes dans la complexité dramatique des événements de l’histoire, ils restent fermes dans la certitude que Dieu est Père et qu’il nous aime, même si son silence nous demeure incompréhensible.

...l'humilité, accepte le mystère de Dieu et Lui fait confiance même dans l’obscurité

...Dieu tient le monde entre ses mains et que malgré toutes les obscurités il triomphe.

...Par la présente Encyclique, voici à quoi je voudrais vous inviter: vivre l’amour et de cette manière faire entrer la lumière de Dieu dans le monde.

...Dans le «face à face» avec le Dieu qui est Amour, le moine perçoit l’exigence impérieuse de transformer en service du prochain, en plus du service de Dieu, toute sa vie. On peut expliquer ainsi les grandes structures d’accueil, d’assistance et de soins nées à côté des monastères. Cela explique aussi les initiatives de promotion humaine et de formation chrétienne considérables, destinées avant tout aux plus pauvres, tout d’abord pris en charge par les Ordres monastiques et mendiants, puis par les différents Instituts religieux masculins et féminins, tout au long de l’histoire de l’Église.

...la volonté de Marie consiste à vouloir avec Dieu

...Marie est une femme qui aime. Comment pourrait-il en être autrement ? Comme croyante qui, dans la foi, pense avec les pensées de Dieu et veut avec la volonté de Dieu, elle ne peut qu’être une femme qui aime. Nous le percevons à travers ses gestes silencieux, auxquels se réfèrent les récits des Évangiles de l’enfance. Nous le voyons à travers la délicatesse avec laquelle, à Cana, elle perçoit les besoins dans lesquels sont pris les époux et elle les présente à Jésus. Nous le voyons dans l’humilité avec laquelle elle accepte d’être délaissée durant la période de la vie publique de Jésus, sachant que son Fils doit fonder une nouvelle famille et que l’heure de sa Mère arrivera seulement au moment de la croix, qui sera l’heure véritable de Jésus (cf. Jn 2, 4; 13, 1). Alors, quand les disciples auront fui, elle demeurera sous la croix (cf. Jn 19, 25-27); plus tard, à l’heure de la Pentecôte, ce seront les disciples qui se rassembleront autour d’elle dans l’attente de l’Esprit Saint (cf. Ac 1, 14)

....La vie des Saints ne comporte pas seulement leur biographie terrestre, mais aussi leur vie et leur agir en Dieu après leur mort. Chez les Saints, il devient évident que celui qui va vers Dieu ne s’éloigne pas des hommes, mais qu’il se rend au contraire vraiment proche d’eux. Nous ne le voyons mieux en personne d’autre qu’en Marie. La parole du Crucifié au disciple - à Jean, et à travers lui, à tous les disciples de Jésus: «Voici ta mère» (Jn 19, 27) - devient, au fil des générations, toujours nouvellement vraie. De fait, Marie est devenue Mère de tous les croyants. C’est vers sa bonté maternelle comme vers sa pureté et sa beauté virginales que se tournent les hommes de tous les temps et de tous les coins du monde, dans leurs besoins et leurs espérances, dans leurs joies et leurs souffrances, dans leurs solitudes comme aussi dans le partage communautaire. Et ils font sans cesse l’expérience du don de sa bonté, l’expérience de l’amour inépuisable qu’elle déverse du plus profond de son coeur. Les témoignages de gratitude qui lui sont attribués dans tous les continents et dans toutes les cultures expriment la reconnaissance de cet amour pur qui ne se cherche pas lui-même, mais qui veut simplement le bien. De même, la dévotion des fidèles manifeste l’intuition infaillible de la manière dont un tel amour devient possible: il le devient grâce à la plus intime union avec Dieu, en vertu de laquelle elle s’est totalement laissé envahir par Lui - condition qui permet à celui qui a bu à la source de l’amour de Dieu de devenir lui-même une source d’où «jailliront des fleuves d’eau vive» (Jn 7, 38). Marie, la Vierge, la Mère, nous montre ce qu’est l’amour et d’où il tire son origine, sa force toujours renouvelée. C’est à elle que nous confions l’Église, sa mission au service de l’Amour:

Sainte Marie, Mère de Dieu,
tu as donné au monde la vraie lumière,
Jésus, ton fils - Fils de Dieu.
Tu t’es abandonnée complètement
à l’appel de Dieu
et tu es devenue ainsi la source
de la bonté qui jaillit de Lui.
Montre-nous Jésus. Guide-nous vers Lui.
Enseigne-nous à Le connaître et à L’aimer,
afin que nous puissions, nous aussi,
devenir capables d’un amour vrai
et être sources d’eau vive
au milieu d’un monde assoiffé.

8:50:16 AM